White Night avait tout pour attirer à lui le public : une esthétique en cell-shading noire et blanche rappelant les Mad World et autres Sin City, et une volonté de replonger les joueurs dans l’époque reine des survival-horrors, celle d’Alone In The Dark, Resident Evil, et de Silent Hill. Le jeune studio français OSome a-t-il atteint ses objectifs ? Réponse dans ce test servi avec toutes nos excuses, près de trois mois après sa sortie.
Fiche Technique
- Date de sortie : 04 mars 2015
- Style : Aventure / Survival-horror
- Classement ESRB / PEGI : Teen / PEGI 12
- Développeur : OSome Studios
- Éditeur : OSome Studios / Activision
- Langue d’exploitation : Voix et textes en Français
- Disponible sur : PS4, Xbox One, PC, Mac
- Évalué sur : Playstation 4
- Prix lors du test : 14,99 $/€ PC, 14,99 $/€ sur consoles
Le cadre de départ dans White Night est simple : Alors que la Grande Dépression s’abat sur l’Amérique, le héros, imbibé d’alcool, est au volant de sa voiture après une soirée qu’on imagine aisément solitaire, dans un bar de jazz, comme en témoigne la bande musicale qui accompagne cette introduction. Il fait nuit et, l’alcool faisant son effet (ne buvez pas quand vous conduisez, sérieusement), notre personnage fini par violemment heurter un arbre. Fort heureusement pour lui, il se trouve à proximité d’un manoir, dans lequel il pense pouvoir trouver de l’aide. Malheureusement, le manoir s’avère rempli de spectres hostiles et habité d’un effroyable secret dont vous, joueurs, serez chargés de démêler les ficelles.
Une direction artistique convaincante
C’est évidemment la première chose qui vient à l’esprit au moment de rédiger ce test. Dès les premiers instants de jeu, ces aplats fait de noirs et de blancs, associés à une caméra fixe disposant de plusieurs angles sur une même zone, donnent au jeu une atmosphère de roman noir typique des années 30 et un sentiment de mal-être qui dure tout au long de l’aventure. Ainsi, la moindre zone d’ombre, le moindre angle mort, ou le moindre signe de déplacement cause immédiatement un sentiment d’inconfort, renforcé par le manque de lumière et par ces allumettes que le joueur récupère pour s’éclairer. Car le danger rôde, en permanence tapis dans l’ombre.
C’est d’ailleurs l’idée principale de White Night : insister sur la force du contraste ombre/lumière. En effet, les spectres errent partout dans le manoir, mais uniquement là où la lumière n’est pas. Pour éviter de mourir, le personnage doit donc les éviter ou trouver un moyen de rétablir l’électricité, seule source de lumière à même de tuer les spectres. Quant aux allumettes, elles servent à éclaire sa route, mais surtout à éviter le game over, car 10 secondes dans l’obscurité totale, et le personnage perd la tête, entraînant un retour immédiat au point de sauvegarde précédent. Si la modélisation 3D reste sommaire, le style graphique du titre, renforcé par une bande sonore de qualité, font que le charme opère immédiatement, et que l’on a envie de savoir ce qui est arrivé à l’ensemble de la famille Vesper, propriétaire du manoir.
Vous reprendriez bien un peu de lecture ?
Très rapidement, White Night pose son univers et fait comprendre au joueur que quelque chose d’assez horrible s’est déroulé dans le manoir Vesper. Le scénario se développe via les monologues du héros, dans un style qui prête parfois à sourire tant certaines répliques sont caricaturales, même si dans l’ensemble elles s’intègrent plutôt très bien à l’ambiance du jeu, tout comme la bande-son, excellente. Mais surtout, il prend toute son ampleur grâce aux nombreuses notes, journaux, portraits et coupures de presses qui jonchent le sol du manoir, et quand je dis nombreux, je veux dire très, très nombreux, parfois au point que casser le rythme de l’aventure. C’est par ce biais, et uniquement celui-là, qu’on parvient à reconstituer les faits et surtout comprendre ce que l’on voit. Ces textes éclairent les parcours des différents personnages présents avant que le héros ne débarque en quête de secours, ainsi que les relations entre ceux-ci.
Avec ces documents, on touche à un point positif du titre qui possède aussi son propre revers : la profondeur scénaristique est surprenante, mais pour découvrir la grande majorité de l’univers, il faut explorer le manoir, ce qui en soi est une bonne chose, à condition que le gameplay ne nuise pas à cette exploration. Hors dans White Night, les game over sont si nombreux qu’on a tendance à avancer rapidement afin de trouver un espace de repos, passant à côté de nombreux éléments à collecter. Sans vous dévoiler les tenants et aboutissants du titre, sachez que vous suivrez les traces d’un tueur ayant des vues sur une jeune chanteuse de jazz, tout en essayant de démêler la relation très particulière entre les membres de la famille Vesper qui semblerait atteinte par une mystérieuse maladie durant la Grande Dépression. Au final, vous arrivez pour trouver de l’aide et vous vous retrouvez à enquêter sur des meurtres tout en étant entourés de spectres pas franchement sympathiques.
Des énigmes en manque d’inspiration
Les choses se gâtent lorsqu’on commence à parler gameplay. Pourtant, la proposition de départ est cohérente : vous vous déplacez dans les pièces du manoir en cherchant à atteindre vivant la suivante. Et comme tout survival-horror à l’ancienne qui se respecte, vous vous retrouvez devant des énigmes à résoudre, et c’est là que le bât blesse. Objets à trouver puis replacer, levier et interrupteurs à activer, mots à reconstituer, tout y passe. Par conséquent, on ne peut que reprocher à White Night son manque d’originalité dans ses énigmes, resucées trop faciles, trop classiques, des énigmes de ses modèles. Le pire, c’est le rapport à la lumière durant ces phases de réflexion, alors que lumière est, rappelons-le, la proposition principale du titre. En effet, notre pauvre détective ne peut pas déplacer un objet s’il tient une allumette, vous obligeant systématiquement à trouver une source de lumière secondaire, et à force, c’est épuisant. À titre personnel, je trouve que ces énigmes sont parfaitement superflues à l’exception de deux ou trois, utiles au dynamisme mais restant maladroites, car elles nuisent à l’expérience, qui elle, par son ambiance et sa direction artistique se révèle agréable. C’est dommage car deux ou trois énigmes vraiment marquantes auraient donné une profondeur de gameplay intéressante à un jeu d’ambiance comme White Night au-delà de son ambiance et de sa narration.
La pénibilité du système de sauvegarde et la gestion de la caméra
Attention, car là on rentre dans la phase du test m’ayant quelque peu vrillé les nerfs. Dans sa volonté de rendre hommage à Resident Evil, White Night propose des points de sauvegardes fixes, matérialisés par des fauteuils confortables dans lesquels il suffit de se reposer quelques instants afin d’enregistrer la progression. Jusque-là rien de très perturbant. Sauf que ces points de sauvegardes sont tellement mal répartis dans le manoir, que le joueur est obligé de régulièrement faire demi-tour, à travers tout un pan du manoir après avoir résolu une énigme pour aller à nouveau sauvegarder, provoquant d’inutiles allers-retours, qui sont eux-même multipliés par les innombrables game over, faisant parfois perdre plusieurs dizaines de minutes du fait de leurs mauvaises répartitions et de ces spectres contre lesquels le joueur ne peut rien faire une fois entré en contact avec eux.
Mais au-dessus de tout, il y a la gestion de la caméra. Cette caméra fixe, empruntée aux classiques du genre, afin de provoquer une peur du hors-champ. Autant le dire de suite, c’est raté. Chaque pièce dispose de plusieurs angles de caméra changeant en fonction de votre positionnement dans celle-ci. Si, en effet, le fait d’être fixe renforce ce sentiment de malaise, parfaitement retranscrit dans White Night, elle s’accommode très mal du fait de la mort instantanée en cas de rencontre avec un spectre, et la maniabilité s’en ressent. En théorie, le joueur peut fuir un spectre l’ayant pris en chasse, sauf que les changements de caméra modifient la maniabilité, ainsi, alors que vous avancez pour fuir, un changement de caméra mal opportun vous fera faire demi-tour et vous entraînera directement dans les bras du fantôme. Dans un Resident Evil, le joueur pouvait se défendre ou encaisser quelques coups en fuyant. Ici, c’est impossible, ce qui rend cette gestion de caméra particulièrement frustrante, et d’autant plus frustrante que, comme on l’a dit, les points de sauvegardes sont trop éloignés les uns des autres, provoquant en plus d’une mort plutôt injuste, une frustration liée à la progression.
Conclusion
White Night n’est pas un mauvais jeu, loin de là. Par son ambiance, sa musique, son esthétisme et sa profondeur scénaristique surprenante, le jeu vous transporte dans un univers glauque, sombre, que j’ai personnellement pris beaucoup de plaisir à traverser tout au long de ses six heures de durée vie en moyenne. Malheureusement, le titre perd de sa superbe, la faute à un gameplay bancal, composé d’énigmes peu inspirées, accompagné d’un système de caméra ne correspondant pas à la proposition de gameplay, rendant parfois la progression pénible, voire décourageante. L’aspect Die and Retry, conséquence de ces éléments de gameplay semble factice, et empêche de profiter de ce que White Night fait de mieux, être un véritable jeu d’ambiance.