J’ai eu la chance de couvrir Penny-Arcade Expo East (PAX East) récemment et j’ai pu remarquer une chose: une absence marquée de l’industrie AAA dans son ensemble. Pratiquement aucun gros joueur n’était présent sauf pour Larian, Square-Enix et CD Project Red qui étaient visibles sur le terrain et dans les conférences. C’est un coup dur lorsqu’on considère que PAX East est l’un des gros évènements sur la côte est de l’Amérique du Nord pour tout ce qui est jeux vidéo.
Dès ma première journée à déambuler, j’ai remarqué qu’il y avait un manque de gros kiosques qui virent dans la démesure. Je n’ai pas vu de bannières gigantesques ni de files d’attente monstrueuses. Probablement que ma perception des évènements de jeux vidéo est un tant soit peu tordue étant donné que j’ai été à la Gamescom l’an dernier et que c’était comme ça.
Pourtant, l’évènement que j’ai vu ce week-end-là ressemblait plus à celui sur un respirateur artificiel. Les couloirs étaient vides bien que l’entièreté du Boston Convention and Exhibition Center était louée. Même les kiosques des gros joueurs présents étaient aussi de grosseurs limitées. Un des plus gros était ironiquement celui de Larian qui était pleinement présent pour continuer de faire rouler la promotion de Baldur’s Gate 3. Tout ça malgré une entrevue récente qui disait qu’ils ne feraient probablement plus de contenu pour la franchise (et Hasbro aussi).
Le vent dans la face
Une des choses que j’ai remarqué au niveau du « timing » de cette année, c’est à quel point il n’y avait rien pour aider la convention. La semaine précédant PAX East, la Games Developers Conference (GDC) se passait avec un triste chevauchement de deux journées. Un étant à San Francisco sur la côte ouest et l’autre à Boston sur la côte est. Un peu dure de bouger tous ces membres de l’industries et de justifier les coûts.
À en juger par les courriels qu’on a reçus, il y avait un plus grand intérêt des représentants du côté du GDC. Chose qui était, par le passé, le contraire. Si une compagnie faisait les deux évènements, la présence à l’évènement publique était excessivement réduite avec souvent un seul jeu ou une possibilité d’entrevue sans réel attachement à un projet particulier.
Autre point qu’il faut considérer, faire des évènements comme PAX East, surtout depuis la COVID, coûte encore plus cher. En plus, il y a un désengagement de l’industrie de vouloir interagir directement avec le public. Plusieurs évènements ont tout simplement arrêté d’exister dans les 5 dernières années : Le MEGA et la Dreamhack à Montréal, PAX South, le E3 et bien d’autres. Les évènements qui sont directement pour l’industrie restent tout de même bien vivants.
Oui la COVID n’a pas aidé ces évènements et de revenir à un état normal est quelque chose en soit, mais le désintérêt de l’industrie s’est amorcé bien avant ça. Sony étant les premiers à décider à ne plus avoir de présence sur le terrain à des évènements autre que le leur. Nintendo étant moins présent, optant plutôt pour faire des tours marketings dans des endroits bien spécifiques.
D’ailleurs, ils étaient présents pour des photos avec Pikachu à PAX East et leur jeu de carte, sans plus. Bref, en Amérique du Nord, du moins, la compagnie semble plutôt viser quelques évènements locaux ciblés. Un autre drapeau rouge était que les annonces arrivaient au compte goûte seulement deux semaines avant le début des festivités. C’est rarement de bon augure en général.
Un mal pour un bien
Là vous allez me dire que je chiale parce que j’ai mal choisi mon évènement à couvrir. Il y a peut-être un quart de vérité dans cette affirmation. J’étais quand même pas mal déçu de voir que la grosse industrie n’était pas au rendez-vous. Mais je trouve ça aussi relativement dommage pour ceux qui paient un prix assez élevé pour 4 jours. 255$ USD pour 4 jours (sans compter les hôtels ridiculement dispendieux et toutes les dépenses qui entourent le voyage).
L’évènement était aussi, avant la COVID, presque religieusement vendue à guichet fermé. Ce qui ne semble plus être le cas et, à voir l’achalandage des « grosses » journées, il y a clairement encore un ralentissement des enthousiastes. Cependant, je vous dirais que la Gamescom a aussi vécu ce genre de ralentissement à la reprise. Donc, on peut encore croire que c’est dans la normale.
Tout ça reste potentiellement un mal pour un bien, si vous avez lu mes aperçus dernièrement. L’absence de gros studios a donné amplement de place pour que les studios indépendant, petits et grands, pour briller. Anciennement, PAX East avait l’indie mega booth qui est éventuellement devenu une plus petite section triée sur le volet, mais il y avait aussi l’effet de village autour avec d’autres studios voulant profiter de ce rayonnement. Cette année, il était amplifié à la presque entièreté de l’exposition.
On regardait à gauche puis à droite et tout ce qu’on pouvait voir était des jeux originaux de studios indépendants. Si le rendez-vous était raté pour le AAA, il était une réussite retentissante pour les petits joueurs de l’industrie. L’enthousiasme des visiteurs y était aussi. C’était difficile de ne pas trouver des attroupements devant les kiosques.
Pour un retour différent
S’il y a quelque chose qui a raisonné avec moi, c’est que l’industrie ne devrait pas abandonner ces occasions de rencontrer directement les joueurs et de montrer les produits qui s’en viennent. Contrairement à ce que les actionnaires et les exécutifs de grosse compagnie croient, l’élément le plus important de l’industrie ce sont les joueurs.
Plus que jamais on peut voter avec nos sous et il y a plus de jeux disponibles sur le marché que jamais. Malheureusement, il faut faire des choix. Dans mon cas à moi, avec des enfants, c’est une réalité qui frappe vraiment solide et ce qui peut changer mon opinion est souvent de pouvoir mettre la main sur un jeu avant sa sortie (que ce soit une démo ou en personne).
Je ne dis pas que je veux nécessairement un retour aux kiosques tonitruants, mais un équilibre entre une présence des Microsoft, Sony et Nintendo sans nécessairement prendre la moitié du plancher est souhaitable. Les joueurs sont encore très sensibles au contact humain surtout avec des créateurs passionnés. Ça peut faire une grande différence entre un titre qui vend et un qui sera oublié.
Si je peux donner un exemple : le producteur de Final Fantasy 14, Naoki Yoshida avait un plaisir fou à interagir avec une salle comble de 3500 personnes. Les fans étaient bouche bée d’obtenir les prochaines nouvelles, sans scripts, et surtout de manière très naturelle. Je ne pense pas qu’une équipe marketing lui ait fait dire quoi que ce soit.
Enfin, quoi qu’il arrive, on doit continuer de faire des évènements comme PAX East. Il faut continuer d’avoir une industrie qui veut aller à la rencontre de ses consommateurs. Mais aussi, d’en faire la célébration d’une culture et des humains qui en font parties. Ce n’est pas juste une question de produit.