Il y a une espèce d’absurdité un peu fatigante au Québec. Une sorte de mentalité qui, même aujourd’hui, est incroyablement prévalente dans la société. La population générale voit encore les jeux vidéo comme une simple bébelle; une mode temporaire pas trop importante.
Sauf que, après avoir couvert je ne sais pas trop combien d’histoires de studios et de développeurs dans le passé, on se rend vite compte que ça ne devrait pas être le cas. Contrairement à ce que le commun des mortels semble croire, le jeu vidéo est une grosse industrie. Gigantesque même. On parle de transactions à grands coups de milliards de dollars dans le milieu et de compagnies qui tombent sous la loupe des bureaux de compétitions parce qu’un achat peut changer la balance économique globale. Il y a des festivals, des compétitions, des diffusions en direct, etc.
On est loin d’une bébelle. Très loin.
En même temps, si vous lisez ça, vous êtes surement déjà au courant de tout ça et je ne vous apprends probablement pas grand-chose. Ce n’est pas vraiment le but de ce texte. Là où je plante mon pied, c’est qu’en 2023, cette mentalité persiste dans les gros médias.
Peu de couverture au Québec
Regardez les gros médias et vous remarquerez qu’il y a souvent une section culture où on se jette sur les genoux pour parler des dernières mouvances du cinéma. On a encore des magazines qui ne font qu’être en pâmoison devant le septième art. Le jeu vidéo de son côté? Rien pantoute. Outre des mentions ici et là dans les sections technos une fois de temps en temps. En presque dix ans, outre pour deux sites avec un endossement de géants médiatiques comme Québecor et Bell Média, il n’y a pas grand-chose qu’on peut définir comme médias spécialisés comme c’est le cas ailleurs dans le monde.
D’ailleurs, parlant de Québecor, leurs dernières coupures ont fait mal à Pèse Sur Start qui perd un collaborateur à temps plein et met l’avenir du site sur la sellette. Quand j’ai lu le tweet de Kazzie Charbonneau, ça m’a rappelé une conversation que j’avais eue avec elle aux premières années du site. Elle me disait qu’au numérique, « PSS » était souvent le projet qui se faisait bouger pour d’autres initiatives. L’avenir était toujours un peu incertain et surtout, toujours elle passait son temps à justifier son existence et son budget. Ce n’est pas étonnant étant lorsqu’on considère que le site avait commencé comme sous-section de la rubrique « Sac de Chips »; une section qui ressemblait plus à du potinage en ligne.
Des coupures partout
Or, c’est le genre de traitement qu’on retrouve un peu partout dans le monde pour les médias traditionnels. Launcher, l’initiative gaming du Washington Post, a récemment fermé ses portes suite à des coupures. IGN et Gamespot ont fait le même tour de barre récemment. De l’autre côté de l’océan, c’est GameKult qui a vu l’entièreté de sa rédaction claquer la porte après un achat d’une compagnie qui ne voit pas le jeu comme du réel journalisme.
Bref… ça fait pitié.
Surtout chez nous, dans notre cour. À Montréal, on a des tonnes de studios, grands comme petits, et pourtant, pour faire connaître leur jeu, il faut passer par des sources européennes et américaines pour en apprendre plus. C’est embarrassant de voir que plutôt que d’investir à faire rayonner des fleurons créatifs, on continue de jouer à l’autruche et se mettre la tête dans le sable. « Le jeu vidéo est une bébelle », ce que bien des gens doivent se répéter à chaque fois que quelqu’un apporte l’idée d’en faire la couverture.
Si on peut devenir un pôle de la production de jeux vidéo, pourquoi ne pas aussi devenir l’exemple à suivre dans le journalisme du même milieu?
Ça me semble tout simplement logique.