Frankenstein ou le Prométhée moderne, le livre de Mary Shelley, aura suscité moult fantasmes et ambitions auprès de ses lecteurs. Après tout, qui n’a jamais rêvé de créer de ses mains cette beauté aussi fragile et insouciante qu’est la vie ? Ce n’est pas pour rien que l’œuvre s’est vue adaptée à de nombreuses reprises, sous différents formats. Mais telle l’étrange créature incomprise du roman, beaucoup ont vu leur rêve se changer en véritable monstre, au détail près que celles-ci se retrouvent sans conscience, sans âme… Un peu comme le dernier film de Paul Mc Guigan en somme, Docteur Frankenstein. Rattrapant mon retard, j’ai souhaité profiter de la sortie DVD / Blu-Ray pour me mettre dans le bain, et voir l’une des adaptations centrées sur l’un de mes personnages fantastiques préférés. J’aurais dû m’abstenir…
Fiche technique
- Date de sortie : 25 novembre 2015 (France) / 25 novembre 2015 (Amérique du Nord)
- Genre : Action / Fantastique
- Classement : tout public avec avertissement
- Réalisé par Paul Mc Guigan
- Scénariste : Max Landis, d’après Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley
- Producteur : John Davis (Davis Entertainment)
- Distributeur : 20th Century Fox
- Titre original : Victor Frankenstein
- Disponible en DVD et Blu-Ray sur le marché
Pas d’acteur en vue à l’horizon, capitaine
Contrairement à ce que laisserait penser le titre, le film se sert uniquement de l’histoire de docteur Frankenstein comme prétexte d’évolution de son protagoniste principal, le Bossu, joué par Daniel Radcliffe. Clown dans un cirque, ce monstre de foire trouve un peu de répits dans la médecine, et plus particulièrement dans l’anatomie humaine. Son salue n’arrivera qu’en la présence du Docteur Frankenstein, interprété par James McAvoy, qui le sortira de ce lieu pour lui rendre un statut plus humain. Et notamment en lui donnant un nom : Igor.
L’œuvre cinématographique de Paul Mc Guigan s’exprime donc par une mise en abîme de Frankenstein. Cette technique, utilisée déjà lors du roman, avait l’avantage de sublimer les péripéties de notre savant fou. Ce qui est loin d’être le cas ici, McAvoy passant au second plan ou ayant la même importance que Radcliff. De ce fait on a du mal à s’attacher au personnage de cette relecture/prequel, paradoxalement central à l’intrigue.
Un détachement qui n’est peut-être pas non plus étrange au jeu des acteurs. L’acting de McAvoy est souvent surjoué. Si cela passe plutôt bien pendant ses moments de délire, cela reste assez dérangeant à la longue. Surtout que ses rares moments de quiétudes peinent à émouvoir. Radcliff, quant à lui, est enfermé dans son personnage timide et curieux. Son évolution reste assez nébuleuse, jusqu’au plan final, hormis pendant les instants passés avec Lorelei, campée par une Jessica Brown Findlay pas assez présente à l’écran. C’est un souci, dans la mesure où Lorelei est un parallèle à Frankenstein : c’est le véritable personnage qui fait ressortir la part humaine d’Igor, alors que Victor ne souhaite que se servir des capacités de son ami pour ses propres buts. Terminons par la prestation d’Andrew Scott, antagoniste principal jouant le rôle de Roderick Turpin. C’est le personnage le mieux construit du film, tiraillé par sa vengeance personnelle et sa foi, et qui sauve plus ou moins tout le casting.
Prométhée… us ?
La direction artistique nous entraîne dans une atmosphère victorienne assez classieuse. On s’y croirait assez facilement, à un détail près : la présence du fond vert se fait sentir et casse notre immersion aux moments clés, lors des plans larges. Or, ces fameux cadres dans Docteur Frankenstein sont censés nous intégrer plus intensément dans l’univers proposé. Certains lieux font tout de même mouche, comme le cirque en début de film, ou l’école de médecine. Heureusement, la diversité des décors émerveille un minimum le spectateur. Néanmoins, l’ambiance générale est — presque — un repompé complet des Sherlock Holmes de Guy Ritchie (mais si, vous savez, ceux dont le célèbre enquêteur est interprété par Robert Downey Jr.). Un détail qui aura fâcheuse tendance à sortir les puristes du film assez facilement d’ailleurs, tant cette aura est présente.
Le travail de Craig Armstrong, concernant la musique, sert correctement le propos du film, nous mettant facilement dans l’ambiance voulue, mais ne réussira pas l’exploit de vous éblouir. Aucun morceau ne vous restera en mémoire, hormis ces fameux thèmes rappelant les aventures de notre illustre détective précédemment cité dans cette critique. Un comble quand on sait que le même compositeur a travaillé sur le remake de Gatsby, le Magnifique, réalisé par Baz Luhrmann, comprenant des thèmes beaucoup plus inspirés et intéressants, à peine 2 ans avant Docteur Frankenstein.
Conclusion
Si la direction artistique et musicale est plutôt bien travaillée — mais ne vous marquera pas spécialement pour autant vu le manque d’effort fourni — l’ensemble est desservi par un jeu d’acteur à la limite du nanardesque, par la construction bancale des personnages et par l’approche approximative du récit, alors que l’équipe partait d’une base plutôt facile d’accès. Une œuvre à vite oublier, ou à consommer en cas de grosse pénurie de films sous la main… et encore.