Il y a de fortes chances que je sois la seule personne, avec David, dans cette rédaction pour qui la plus grosse surprise de la conférence Square Enix était l’annonce de NieR New Project. Pour pouvoir comprendre notre enthousiasme face à ce projet, il va falloir tout d’abord expliciter son passé, avant de revenir sur les dernières news de l’Electronic Entertainment Expo 2015
Replicant Versus Gersalt
NieR premier du nom, c’est avant tout un concept. Un jeu de niche, aux allures de titre un peu barbare, avec une technique de graphismes un poil raté à la ramasse, mais possédant une certaine poésie, et au scénario fort intéressant, malgré un non-sens total apparent. Tout simplement car le jeu se base sur une idée simple, le gestaltisme, ou psychologie de la forme, théorie selon laquelle les processus de la perception et de la représentation mentale traitent spontanément les phénomènes comme des ensembles structurés et non comme une simple addition ou juxtaposition. L’exemple le plus simple est le Vase de Rubin, un effet d’optique assez connu puisque l’on a l’impression de voir deux visages formant un vase ou une coupe, et inversement.
NieR, c’est l’histoire d’un père, à la recherche d’un remède pour sa fille Yonah, jusqu’à ce que cette dernière se fasse enlever par un ennemi assez énigmatique. Au court de son périple, il découvrira que son passé n’est que mensonge et qu’un lien imperceptible entre ce ShadowLord et lui existe.
NieR, c’est aussi un jeu sorti en deux versions différentes. La première, intitulé Replicant, n’est autre que la version japonaise du titre, uniquement sortie sur PlayStation 3, qui présentait un personnage assez jeune en tant qu’avatar numérique. Alors que l’autre version, occidentale, intitulée Getsalt, proposait de jouer un héros âgé, est sortie sur PlayStation 3 et Xbox 360. Pour l’anecdote, la différence existe à la suite d’un consensus des branches occidentales de Square Enix avec la branche japonaise, à cause des stéréotypes de l’époque.
Enfin, NieR, ce sont ses multiples fins, impactées par les choix moraux qu’avait fait le joueur lors de son périple, toutes plus tordues les unes que les autres, et nous encourageant à explorer davantage le jeu pour connaître toutes ses subtilités. D’ailleurs l’une d’entre elles vous obligeait à supprimer votre sauvegarde, et à recommencer avec un nom de personnage différent.
Le rapport au passé et au changement
Maintenant que ce cours intensif de NieR est terminé, penchons-nous sur les dernières annonces en date pour le titre, puisque Yoko Taro, directeur sur le titre, et Yosuke Saito, producteur du jeu, ont apporté pas mal d’informations lors de leurs dernières interviews. À commencer par la première subtilité, la double localisation du précédent opus. Ceci n’est pas prévu pour NieR New Project puisque les développeurs ont jugé bon d’apporter la même expérience aux joueurs, occidentaux comme japonais. Un choix qui est certainement lié au fait que la console ne se vend pas sur le territoire nippon. Une double sortie aurait alors apporté des coûts de développements non négligeables.
Quant aux choix multiples, Taro et Saito ont avoué qu’ils comptent bien évidemment garder ce système, mais qu’ils n’impliqueront plus une fin à suppression de sauvegarde, comme ce fut le cas avec le premier NieR. Un parti-pris expliqué par Yoko Taro dans l’interview.
Nous allons garder l’idée de choix multiples pour le nouveau projet. En ce qui concerne la suppression de sauvegarde nous ne la garderons certainement pas, vu que cela se trouvait dans la version originale et que nous voulons de nouvelles choses. Les choix multiples seront de la partie. Mais vous savez, nous n’en sommes qu’à la première phase du développement. Qui sait, nous supprimerons peut-être vos sauvegardes.
L’auteur se base par ailleurs son expérience passée sur NieR, mais aussi sur une autre de ses grandes licences, Drakengard. Ces deux jeux ont par ailleurs fait la renommée de Yoko Taro de créer des jeux bizarres, au point qu’ils ne laissent pas les gens indifférents, que ce soit en bien ou en mal.
Drakengard a été mon premier jeu en tant que réalisateur. Le conseil consultatif nous a demandé que l’on fasse des modifications ou que l’on recommence des choses. Honnêtement j’ai dit : au diable, j’en ferais pas un autre. Je pensais qu’avec NieR, je ferais un jeu normal. C’est ce que j’ai essayé de faire, un jeu normal, seulement les gens pensent qu’il est très sombre.
La façon dont je regarde le premier NieR est comme le repas que prépare votre mère : ce n’est peut-être pas le meilleur, mais ça va, vous êtes satisfait avec. Les médias m’ont dit que le NieR original est comme un chien que l’on rejette. Dans un sens c’est mignon mais d’un autre côté c’est faux, vous l’aimez malgré tout, même s’il manque quelque chose et que vous ne pouvez pas poser la main dessus.
À présent, nous travaillons avec Platinum Games ainsi que Yoshida et Okabe, et nous avons le sentiment que nous avons de superbes ingrédients. Est-ce que ça va être parfait ? Nous avons tous ces grands noms si vous voulez qui travaillent ensemble. Maintenant, est-ce qu’il va manquer cette petite chose qui rendait le plat aussi attachant auprès des fans ? En y repensant, on va essayer et voir ce que cela donne.
Nouveautés quand tu nous tiens
Si le premier NieR ne nous laissait contrôler qu’un seul personnage, nonobstant cette différence de version occidentale ou japonaise, le prochain titre proposera de contrôler trois avatars. Le premier est bien entendu la jeune fille aux cheveux cendrés, qui pourrait faire penser à Cirilla, personnage central de The Witcher 3 dans une moindre mesure, et que l’on aperçoit à la fin du teaser. Un autre, un homme cette fois-ci, est visible en plein milieu du trailer, au sommet d’un immeuble, au-dessus de ruines. Le dernier, quant à lui, n’a pas encore été montré.
Tout ce que l’on sait sur eux pour le moment, c’est qu’ils ne sont pas des personnages déjà connus de la licence, même si certains d’entre eux auront un lien évident avec des branches de scénario de NieR New Project. Par ailleurs, l’histoire se passe dans le futur et ne suivra pas les péripéties du premier épisode. De plus, les liens entre l’histoire et ces anciennes connaissances, ne seront pas très importants, pour éviter aux nouveaux arrivants de se sentir perdus dans leur propre progression. Cela ne restera que des références et des easter eggs.
Pour ce nouveau NieR, nous avons gardé le côté action-RPG mais cette fois, nous voulons en faire un J-RPG de haut niveau. Nous allons donc nous concentrer sur le design des personnages.
Autre information qui a son importance, le système d’arme utilisé dans Drakengard sera le même pour cet opus. L’information vient d’une autre interview, cette fois-ci de Famitsu. Ces derniers nous apprennent par ailleurs que Yoko Taro viserait un CERO A (l’équivalent japonais du PEGI 7-12) alors que le précédent NieR possédait un classement D, soit PEGI 18.
Deux écoles différentes
L’apport de Platinum Games est un plus non négligeable pour l’équipe, d’après les commentaires de Yoko Taro et Yosuke Saito. Ce qui aurait pu poser problème puisque le studio possède un style beaucoup plus nerveux et dynamique. Un choix qui n’a pourtant pas l’air d’impacter l’évolution de NieR.
Les gens de Platinum Games sont très compétents dans la création de jeux d’action, et nous leur avons demandé de faire les choses d’une façon plus simpliste. Au début, j’ai cru que le jeu allait être orienté action/combat, mais heureusement de nombreux membres de Platinum Games respectent NieR et se sont investis à fond, comprenant le projet le que nous souhaitions réaliser.
Nous sommes très chanceux. Ils ont essentiellement repris le système de combat ainsi que le game design du jeu original et ont ajouté des éléments de qui leur est propre par-dessus pour en faire cette sorte d’hybride. Ce n’est pas comme si le jeu était complètement nouveau, ils ont vraiment du respect pour le premier NieR.
Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que la cohésion au sein des différentes équipes paraît solide, avec pour volonté d’apporter la meilleure expérience qui soit. Et pour Yosuke Saito, il n’existe qu’un seul support sur lequel on pourra profiter du titre à fond :
S’il vous plaît, jouez sur PlayStation 4
Si l’exclusivité semblait de mise lors de l’annonce de NieR, cette tournure de phrase, à la demande des journalistes concernant les possibles attentes de joueurs Xbox, peut nous rendre perplexe. Un portage par un studio tiers ? Une vraie exclusivité Sony ? Nous en saurons peut-être plus dans un futur proche. Surtout qu’en l’état, le titre n’est qu’à 10% de son développement à peine d’après Famitsu.
NieR possède donc un avenir tout tracé. Et vu les équipes derrière ce projet ambitieux, on peut déjà s’avancer sur le fait que ce sera l’un des titres à surveiller courant 2016. Rendez-vous pendant cette période pour voir si les prédictions réalisées sont les bonnes. En tout cas, l’aura est présente, et c’est plutôt bon signe.