Ubisoft Montréal organisait en fin de semaine, une rencontre avec les journalistes pour présenter son jeu Child of Light. On peut d’ailleurs souligner que la présentation était à l’image du jeu puisque le côté artistique était mis de l’avant avec les nombreuses illustrations sur les murs de la galerie d’art et la présence de Coeur de pirate puisqu’elle a composé la trame sonore du jeu.
S’il faudra attendre le test du jeu pour en avoir une idée plus complète, Child of Light attire l’attention par son esthétique particulière qui fait penser à une véritable peinture à l’aquarelle et à un univers féerique. Loin des jeux AAA, on se retrouve plus proche d’un projet personnel et passionné qui a le potentiel de plaire aux enfants ainsi qu’aux parents. Dans Child of Light, le joueur incarnera Aurora, une enfant au cœur pur, dont l’âme se retrouve transportée dans le Royaume de Lemuria, privé de ses 3 sources de lumière. Afin de sauver ses habitants, elle devra récupérer le Soleil, la Lune et les Étoiles, et vaincre la mystérieuse Reine Noire.
Pour en savoir un peu plus sur le jeu et son développement, nous avons interviewé Lionel Raynaud, vice-président création chez Ubisoft Montréal.
Geeks and Com’ : Quelle a été l’idée de départ de Child of Light ?
Lionel Raynaud : L’idée originale du jeu vient de Patrick Plourde, directeur créatif chez Ubisoft Montréal. Il avait envie d’explorer deux choses :
- les principes des jeux de rôle japonais car c’est un grand fan du genre. Il y a beaucoup de valeur dans ces mécaniques de jeu que nous n’avons pas eu l’opportunité d’exploiter encore ;
- les contes et l’univers illustratif qui les caractérisent.
Le lien entre les deux? La puissante métaphore qu’il existe entre le fait de level up dans un RPG, de gagner des compétences ainsi que des nouvelles aptitudes qui permettent de passer à travers des obstacles qui étaient avant impossibles, et le passage par la maturité et la sagesse de l’enfance à l’état adulte qui se fait par la rencontre de compagnons qui ont eux-mêmes des compétences différentes et complémentaires.
Ces derniers viennent aider Aurora à surmonter des obstacles pour passer de l’état de victime perdue dans un nouveau monde oppressant et impressionnant, à l’état de facteur de changement, maîtresse de son destin avec un vrai pouvoir d’action sur le monde.
Cette synergie entre les mécaniques de jeu, la narration et ce traitement artistique donnait au concept beaucoup de force et c’est pour cela qu’on a laissé l’équipe explorer l’idée. Tout le monde a très vite embarqué, aucun doute ne s’est posé à aucun moment sur le potentiel de Child of Light.
Quelle liberté ont eu les développeurs par rapport à d’autres jeux ?
C’est une question difficile car ils avaient toute liberté, mais je ne dirais pas qu’il y a peu de liberté sur la création d’un jeu AAA ou d’une franchise connue. C’est pour cela que l’on a des nouveautés et des surprises dans chaque nouveau Assasin’s Creed, Far Cry ou Watch Dogs par exemple.
Il y a donc eu beaucoup de liberté créative, c’est certain, mais en ce qui concerne l’encadrement cela a été réellement le même principe et la même relation que pour les autres jeux. Ainsi, Child of Light a eu autant de retour du studio, des confrères ou même du publisher.
Le résultat a peut-être été plus étonnant que ce qu’on a l’habitude de voir car la vision de départ était très forte et nouvelle. Mais c’est aussi parce que l’équipe, plus petite, a permis une cohérence très rapide qui s’est installée entre chaque métier pour arriver à livrer quelque chose qui est à la fois unique et homogène pour le joueur avec un message, un thème, un vécu. C’est peut-être cela qui ressort le plus fortement quand on joue à Child of Light.
Quand on regarde le jeu, on a l’impression d’un jeu indépendant que l’on attendait pas forcément d’un studio comme Ubisoft par exemple. Était-ce une volonté forte de la part des développeurs ?
C’est vrai que c’est peut-être le résultat mais ce n’était clairement pas une volonté de notre part. On a eu ce genre de commentaires également au moment de la sortie de Blood Dragon avec des personnes qui se disaient qu’Ubisoft Montréal ne pouvait pas sortir ce genre de jeux. Mais oui, on est capable de le faire!
De mon point de vue, qui supervise tous les jeux qui sortent, cela ne me semble pas bizarre que l’on ait ce genre de jeux. Il n’a pas été crée de façon très différente des autres jeux comme je le disais, mais je suis très heureux que le résultat soit perçu comme différent et comme étant attractif. J’ai hâte que beaucoup de joueurs y jouent et nous donnent un retour sur leur expérience de jeu.
On espère bien proposer d’autres jeux surprenants venant d’Ubisoft. Tant qu’il y a des directeurs créatifs avec des envies très fortes et que nous sommes d’accord sur la faisabilité technique, l’équipe possible pour la réalisation du jeu et un public pour celui-ci, alors il n’y a aucune raison de ne pas faire ce genre de jeux.
En ce qui concerne la trame sonore, vous avez fait appel à Coeur de Pirate. Elle n’était pas seule sur votre liste. Comment s’est arrêté votre choix ?
Patrick Plourde voulait absolument travailler avec Coeur de Pirate. Sa musique a des tonalités qui portent le sentiment d’intimité, parfois de nostalgie et de mélancolie, que l’on voulait donner notamment au début du jeu. Nous n’étions pas sûr que cela allait être possible mais c’était un choix idéal pour nous.
On a discuté avec Béatrice et l’entente a fonctionné très vite car elle a vraiment compris le jeu. Elle n’avait pas le jeu devant elle pour composer car personne ne l’avait à l’époque, il s’agissait juste d’idées de Patrick Plourde dans sa tête. On a juste pu lui fournir quelques artworks au départ, mais elle a travaillé sur le thème et sur la grande majorité de la bande sonore sans avoir beaucoup de visuels.
Mais cela a juste confirmé que le choix de l’artiste était le bon car, au moment où les deux se sont rejoints, nous étions très contents du résultat et c’était également le cas pour Béatrice. Elle était émue et très heureuse de voir comment les choses fonctionnaient ensemble et comment le visuel, l’animation, le personnage allaient très bien avec la musique.
En ce qui à trait aux joueurs, on parle d’un public large avec des enfants et les parents. Comment se sont passés les Focus Group ? Une utilisation de la biométrie également pour analyser ce jeu ?
On a fait jouer beaucoup de joueurs comme on le fait pour tous nos jeux chez Ubisoft Montréal. On a aussi fait jouer des enfants avec leurs parents pour voir comment cela fonctionnait ensemble. Cette envie de se baser sur des tests utilisateurs est quelque chose de très fort chez nous et pour Patrick plus particulièrement. En effet, il pense que l’on y trouve beaucoup de valeur et que c’est la meilleure façon de faire des bons jeux.
Il y a parfois la vision créative d’un homme qui veut porter son projet et qui se fout de l’expérience que les joueurs vont vivre. C’est une très mauvaise façon de travailler selon nous et Patrick trouve le bon équilibre. En effet, selon moi, il a une vision très forte qu’il sait conserver, tout en étant capable de remettre en cause son travail en fonction du retour des joueurs ou de la manière dont on les voit jouer lors de nos tests, par exemple.
Comme pour les autres jeux, il y avait également plusieurs systèmes biométriques pour observer les réactions des joueurs. Notre approche est d’observer plus ce qu’il se passe quand un joueur qui n’est pas designer prend en main le jeu, plutôt que de lui demander ce qu’il en pense.
En effet, ce que pense un joueur n’est pas toujours actionnable pour un développeur mais, en revanche, on a toujours l’intuition de ce que l’on veut obtenir : à quel moment le joueur doit être inquiet, satisfait, se sentir puissant, en danger… On veut créer cette expérience et elle est désignée dans le déroulé du jeu car on veut un parcours émotionnel. En soumettant cette idée de départ au test de la réalité comme dans nos focus group alors on apprend de nombreuses choses et on peut le faire évoluer.
Comment les spécificités des différentes consoles ont-elles été exploitées pour Child of Light ? Peut-on imaginer une expérience avec la tablette sur Wii U (un compagnon) ?
Il y a très peu de différences dans le traitement du jeu sur les différentes consoles y compris entre générations de consoles. Child of Light se prête très bien, par sa technique, à être de très haute qualité partout. On retrouve donc la même aventure, les mêmes personnages, le même rendu d’aquarelle interactive.
C’est vrai que l’utilisation de l’écran tactile sur la Wii U pourrait offrir une spécificité intéressante notamment pour la coopération entre deux joueurs. Des choses arriveront sur la console par la suite mais aujourd’hui l’expérience est exactement la même.
Child of Light sera disponible en téléchargement dès le 30 avril prochain au prix de 14,99$ sur Xbox LIVE pour Xbox 360 et Xbox One, sur le Playstation Network pour Playstation 3 et Playstation 4, sur l’eShop de Nintendo pour Wii U, et sur plateformes digitales pour PC.